Son petit nom scientifique c’est Brettanomyces bruxellensis. Les oenologues l’appellent tout simplement « Brett« et en général ils préfèrent ne pas la rencontrer dans leurs vins à cause d’odeurs désagréables dont la « Brett » a le secret. Oui mais voila, il existe un autre monde pour la « Brett« . Un monde dans lequel sa présence est revendiquée et parfois même affichée. Celui des amateurs de Kombucha. Une boisson fermentée à base de thé et de sucre que ses promoteurs qualifient de « boisson santé ». Et depuis peu, un autre monde totalement nouveau et innovant s’ouvre à la petite Brett, celui de la « bio-couture ».

A gauche le vinaigre artisanal de Combucha, à droite la boisson désaltérante acidulée et légèrement pétillante laborée, elle aussi, à partir du champignon de kombucha
Commençons d’abord par les présentations. Cette petite « brett » tant redoutée par les œnologues n’est autre qu’une levure somme toute assez répandue et totalement inoffensive du point de vue pathogène. Si elle contrarie tant les œnologues c’est parce qu’elle possède, dans certaines conditions, la fâcheuse disposition de transformer quelques composés du vin en molécules volatiles dont l’odeur rappelle, au mieux, l’encre ou la gouache, au pire, la sueur de cheval quand ce n’est pas le poulailler ou l’écurie. Oups! On parle alors de vins phénolés. L’adjectif dérivant tout droit du nom de ces molécules malodorantes, les éthyls-phénols. Bref, on l’aura compris quand on travaille de près ou de loin dans l’oenoloqie, et n’en déplaisent à ceux qui voient dans l’effet « brett » un je ne sais quoi donnant au vin comme un « bon goût de terroir pouvant plaire aux nostalgiques des vins d’antan! » la petite « brett » est rarement bienvenue en œnologie. J’en étais donc à ce modeste niveau de connaissance à propos de cette levure lorsque l’été dernier, oh surprise, je découvre sur les rayons d’un magasin une petite bouteille de « vinaigre de Combucha ». On prononce KOM-BOU-TCHA et on peut aussi écrire Kombucha. La vision de ces trois syllabes associées au murmure de ma prononciation ravive immédiatement ma mémoire. Oui, j’ai déjà entendu ce nom à la consonance exotique qui évoquerait plutôt une danse folklorique. C’était quelques mois plus tôt, à l’occasion d’un colloque d’œnologues justement. De retour chez moi, petite recherche dans mes notes. Et Bingo! Je remets la main sur la petite phrase qui avait alors piqué ma curiosité. La voici : « Brett est une levure associée à de nombreux produits fermentés, alimentaires ou non, comme le vin, le cidre mais aussi, la bière, la féta, le kéfir, le bio-éthanol ou encore, le kombucha, une boisson à base de thé noir, ou vert, dont la complexité aromatique aurait à voir avec la présence de Brett. ».

L’étiquette (à gauche) précise que parmi les ingrédients de fermentation figure une association de levures et de bactéries, le fameux « champignon kombucha »
Une petite recherche sur internet s’impose, où je découvre une boisson originaire d’Asie, Chine, Japon, Corée élaborée à partir d’une association, ou symbiose, entre des levures et des bactéries que l’on surnomme abusivement, le champignon de thé. Etiquetée depuis quelques années comme une boisson « santé » aux effets antioxydants, détoxifiants et régénérants, le Kombucha est devenue « tendance ». Il est désormais vendu en bouteilles au rayon frais mais la voie traditionnelle de son développement, c’est la transmission artisanale de la main à la main depuis des générations d’un morceau du fameux « champignon » qu’il faut ensuite faire grandir en lui donnant du substrat à fermenter. De nombreuses démonstrations de mise en culture « à la maison » sont proposées sur internet. Succès garanti avec la mode du « faites le vous-même » A la dégustation, je découvre une boisson à peine alcoolisée, légèrement gazeuse, acidulée et un peu phénolée. Ses promoteurs lui attribuent de nombreuses vertus en tant que probiotique. Cela dit, des esprits plus critiques pointent tout de même que les effets positifs sur la flore intestinale n’ont pas été constatés chez l’homme mais sur le rat et préconisent de conduire objectivement des études plus approfondies afin de préciser les doses « bénéfiques », les pathologies concernées, mais aussi la variabilité des effets, les conséquences de la pasteurisation et des conditions d’hygiène dans l’élaboration du Kombucha sur ces effets. Dont acte!
Dernière surprise, les recherches sur internet m’ont amenée à prendre connaissance des travaux d’une designeuse anglaise, Suzanne Lee. Cette femme crée des prototypes de vêtements et de chaussures à partir d’un matériau « révolutionnaire », une sorte de cuir d’origine microbiologique, élaboré entièrement à partir de Kombucha. Ses travaux ont été présentés en 2013 lors d’une exposition de la Fondation EDF consacrée aux designers du futur, ceux qui créent avec la nature. Dans la vidéo qui suit, Suzanne Lee nous livre l’esprit de son travail, ses secrets de fabrication et ses ambitions.
Mais qu’est-ce qu’il est chouette cet article! MERCI pour toutes ces infos…
Pour la robe de soirée en « kombucha » il faut quand même viser les climats pas trop pluvieux.