Petit miracle de la création artistique ! Qu’un artiste s’empare d’une technologie plus ou moins familière et c’est notre regard qui change. Ou comment j’ai découvert qu’un semoir de précision métamorphosé en imprimante au champ peut élargir le regard sur la place de l’agriculture.

Le travail de l’artiste allemand Benedikt Gross
Entre le Land art et le Street art, je suggère solennellement qu’il existe aussi l’art des Champs. Dont acte! Promis, je vais réfléchir à une possible traduction en anglais. Ca sonnera sûrement mieux. Toujours est il que l’idée s’est imposée en découvrant le travail de l’artiste allemand Bénédikt Gross proposé dans l’exposition Constellation.s organisée par Arc en Rêve dans la grande nef du CAPC de Bordeaux le mois dernier. Certes, les paysages agricoles ont souvent inspiré les peintres et les photographes. Certes, les agriculteurs sont parfois surnommés les sculpteurs du paysage. Mais là, c’est autre chose. Et cet « autre chose », c’est le détournement du savoir faire de l’agriculture de précision au profit de la création artistique. Ou comment un semoir de précision métamorphosé en imprimante géante questionne l’agriculture sur ses buts et son rôle vis-à-vis de la société. Mais de quoi s’agit-il ? Tout commence avec un joli dessin conçu par l’artiste à partir de son ordinateur avec comme fond de carte les contours du champ à semer. Les nuances de couleur seront obtenues en variant les espèces mises en terre par le semoir intelligent car ce dernier sait changer automatiquement l’espèce de la graine à semer sans que son chauffeur ait besoin de s’arrêter. Trop fort ce semoir ! Mais on fait quoi avec tout ça me direz vous? Bonne question. C’est là justement que le regard change et que cette technologie utilisée jusque là à des fins rationnelles de productivité prend du service au profit de l’esthétique. Un peu court, dirons certains! Que neni ! Le beau stimule l’esprit, encourage la réflexion et au final tout ça rend plus libre. Et puis, et puis … ce dessin au champ raconte aussi la biodiversité et son rôle dans nos vies, ne serait-ce que pour nous sauver des dangers de l’uniformisation. De tous les dangers qui nous guettent avec l’uniformisation. Et là, on dépasse largement le champ du champêtre! Ah ah! Et puis comme pour dire que tout cela n’est pas uniquement le délire d’un artiste, on n’oubliera pas de lire la note en fin de vidéo (en cliquant plus haut sur le lien de l’artiste). Ce lien précise en effet que le champ a été récolté pour produire du biogaz à partir de toute la biomasse issue de cette expérience artistique au champ. Rien ne se perd ! Tout se crée et se transforme !